Pourquoi certains vins sont-ils bons, et d’autres non ? Quelle est la différence entre un bon vin et un mauvais vin ? Quels sont les facteurs qui entrent en jeu ?

Pour citer les Gouttes de Dieu, le vin est issu de trois composantes essentielles : la Terre, le Ciel et les Hommes. Je trouve que cette définition est sympathique et qu’elle permet de répondre à une partie de la question d’un « bon vin ».

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Car effectivement, un vin ne serait pas grand chose sans la Terre. Par la Terre, on entend bien évidemment le terroir dans lequel s’épanouit la vigne, mais aussi la vigne en tant que végétal. Le terroir est un peu comme la palette d’un peintre ou le solfège pour un musicien : c’est une base sur laquelle on travaille afin de donner un produit fini. Un grand terroir ne garantit pas un beau vin, mais difficile d’avoir un grand vin sans beau terroir. Le terroir étant à la fois le sous-sol dans lequel évolue la vigne, mais aussi l’ensoleillement que subit le terrain. Certains terroirs sont d’une force unique : c’est entre autre la force d’un terroir comme Chablis : bien qu’ayant pour cépage unique le chardonnay, la typicité de ce dernier se fait littéralement écraser par la force du terroir chablisien. C’est ainsi que les Chablis sont uniques, et radicalement différents de leurs autres frères bourguignons, qui eux, magnifient le cépage par la profondeur du terroir (il vient ici s’ajouter, et non écraser le cépage). En deux mots comme en cent, un très grand vin est indissociable d’un grand terroir, comme le peintre ne peut faire de belles peintures sans belles couleurs. Condition nécessaire mais non suffisante, car un terroir ne garantit pas la qualité du vin.

Eaux et caillouxLe Ciel est le second paramètre dans les Gouttes de Dieu. Par là, on entend évidemment le climat. Sur deux années différentes, le même vin ne sera pas identique. Car les conditions climatiques influent sur le raisin, le rendant plus acide dans un climat pluvieux, plus sucré au soleil. Les périodes d’ensoleillement en fonction de la maturité des fruits peuvent radicalement changer la face d’un vin, d’une année sur l’autre. Mais l’année ne fait évidemment pas tout. Bien souvent, je préfère une grande année sur un vin de gamme inférieure à une petite année d’un grand vin. C’est un paramètre, mais pas une certitude. Ce n’est pas parce que 2000/2005/2009 sont magiques dans le bordelais que tous les bordeaux de ces années sont bons. Loin s’en faut.

La troisième inconnue de l’équation « analytique », ce sont les Hommes. Car ils influent énormément sur le vin. Un jus de raisin que vous laissez pourrir devient du vinaigre, et ce même sur le Domaine de la Romanée-Conti. Sans l’action des hommes, il n’y aurait pas de vin à proprement parler. Déjà sur le choix des cépages. Les lecteurs de ce blog savent que les moines cisterciens et clunisiens ont déjà commencé à délimiter des parcelles et essayer différents encépagements en Bourgogne dès le 11ème siècle. Le choix du chardonnay et du pinot noir en Bourgogne, du cabernet-sauvignon et merlot dans le bordelais et du chenin à Vouvray ne sont pas le fruit du hasard, mais d’un travail parfois pluri-centenaire.

Au-delà de ce travail, il y a aussi les choix du vigneron concernant la taille de la vigne (qui peut influer sur la concentration des raisins), la date des vendanges (plus ou moins tardives, le vigneron prenant alors un risque de perte), mais aussi au niveau de la vinification, de l’entretien de sa vigne (choix du bio, du raisonné, du naturel…). Bref, autant de paramètres qui vont faire que sur une année précise, sur la même appellation, certains vignerons brillent et d’autres restent banals. Et c’est quasiment une règle immuable, mais un bon vigneron sur une petite appellation vous apportera souvent beaucoup plus de plaisir qu’un mauvais vigneron sur un terroir d’une grande renommée.

vigneCes trois facteurs (la Terre par le terroir et la vigne, le Ciel par son climat et l’Homme par ses choix d’agriculture et de vinification) sont les trois inconnues de l’équation d’un bon, voire d’un grand vin… de manière analytique du moins. Car comme un film, une peinture ou un opéra, il faut savoir séparer le côté objectif d’une belle œuvre de son côté subjectif, à savoir ce qu’elle fait naître en vous en terme d’émotions et de ressenti. Et le vin a cette capacité de faire naître des émotions. Sauf que ces émotions et ressentis peuvent être radicalement différents pour un même vin en fonction des conditions de dégustation. Mais nous parlerons de cela la semaine prochaine !